Batteries en France : tout savoir sur les fabricants locaux

1,3 million de tonnes de batteries lithium-ion produites dans le monde en 2023, moins de 2% issues de sites français : le contraste frappe, mais le paysage évolue à grande vitesse. Sous la pression de la transition énergétique et de la réindustrialisation, la France bouscule les codes, injecte des milliards et s’impose avec ses propres règles du jeu.

Où en est l’industrie des batteries en France aujourd’hui ?

Sur le front nord du territoire, une révolution industrielle s’opère. Dunkerque, Douai, Berclau : ces villes sont désormais indissociables de la “Vallée de la batterie”, ce corridor où l’innovation et les ambitions se croisent à haute intensité. Les Hauts-de-France, historiquement forgés par l’automobile, accueillent aujourd’hui les plus vastes projets d’usines de batteries. Parmi eux, Automotive Cells Company (ACC), fruit du rapprochement entre Stellantis, Mercedes-Benz et TotalEnergies, érige l’une des plus grandes usines européennes de cellules lithium-ion.

La structuration de la filière française repose sur trois piliers :

La montée en puissance est tangible. ACC affiche des objectifs de plusieurs dizaines de gigawattheures produits chaque année, de quoi accompagner la transformation accélérée du parc automobile européen. À Lille, la collaboration active entre laboratoires publics et industriels vise à améliorer sans relâche la performance des batteries et leur durée de vie, anticipant la vague de la demande en stockage d’énergie.

Les Hauts-de-France deviennent un terrain d’expérimentation à ciel ouvert. Entre fonds publics, stratégies industrielles et quête d’indépendance européenne, la filière avance vite. Les obstacles ? Sécuriser l’accès aux matières premières, former une main-d’œuvre compétente et ancrer durablement un savoir-faire “made in France”. Malgré tout, l’écosystème bouillonne, attire de nouveaux acteurs et fait renaître l’esprit industriel des régions.

Transition énergétique : pourquoi les batteries sont un enjeu national

La course à la décarbonation chamboule l’industrie automobile française. La batterie lithium-ion, pièce maîtresse de cette mutation, propulse la mobilité électrique et redéfinit l’indépendance industrielle du pays. Depuis que l’Europe a fixé la fin de la vente des voitures thermiques à 2035, la pression s’intensifie : il faut produire vite, localement, et à grande échelle.

Mais l’enjeu dépasse largement la mobilité. Les batteries deviennent cruciales pour le stockage d’énergie renouvelable, pierre angulaire d’un réseau électrique stable et décarboné. Pourtant, la France reste tributaire de l’importation de lithium, de nickel et de cobalt. Assurer des approvisionnements fiables et maîtriser l’impact écologique de la production sont désormais des priorités stratégiques. La rivalité avec l’Asie, qui domine la filière, oblige à accélérer l’innovation et à renforcer la souveraineté.

Sur le plan technologique, la France mise sur la chimie NMC (nickel-manganèse-cobalt), reconnue pour sa densité énergétique et sa fiabilité, tout en cherchant à réduire les émissions associées à la production. Les industriels investissent massivement en R&D pour combler le retard face à la Chine et à la Corée du Sud. Maîtriser le cycle de vie complet des batteries, du premier assemblage jusqu’au recyclage, devient un levier majeur de compétitivité et de réduction de l’empreinte carbone de chaque kilowattheure stocké.

Panorama des fabricants français et des projets emblématiques

La filière française s’organise autour d’acteurs industriels puissants et de projets marquants. Les Hauts-de-France s’imposent comme la “vallée de la batterie”, épicentre d’une reconquête industrielle portée à bout de bras par les collectivités et l’État.

Trois entreprises retiennent particulièrement l’attention. À Douai, Automotive Cells Company (ACC), synergie de Stellantis, TotalEnergies et Mercedes-Benz, a inauguré une usine dédiée à la fabrication de batteries lithium-ion pour voitures électriques. L’objectif est limpide : fournir l’Europe et réduire la dépendance aux importations asiatiques. Plus au nord, à Dunkerque, Verkor pilote la construction d’une gigafactory taillée pour la mobilité électrique nouvelle génération, avec une technologie NMC au service de la performance et de la longévité. La région attire aussi les investissements dans les matériaux actifs et la recherche : à Berclau, Envision AESC prépare une usine destinée à équiper les futurs modèles électriques de Renault.

Le tissu industriel s’étoffe. La filière française s’étend de la production de cellules à l’assemblage des modules, en passant par la préparation du recyclage. La mobilité électrique s’ancre dans le territoire, portée par une ambition partagée de souveraineté et d’innovation.

Femme française souriante avec batterie dans boutique

Entre défis industriels et opportunités d’innovation, quel avenir pour la filière ?

Réindustrialisation, maîtrise des ressources, réduction de l’empreinte carbone : la filière batterie en France affronte une exigence de taille. Sur le terrain, la montée en puissance des usines de Dunkerque ou Douai atteste d’une volonté politique affirmée, mais la réalité est complexe : il faut garantir l’accès au lithium, au nickel et au cobalt tout en limitant la pression sur l’environnement.

Pour répondre à ces défis, les industriels intègrent désormais la circularité et le recyclage dans leurs projets. Le but est clair : récupérer les matériaux actifs des batteries en fin de vie, afin de réduire la dépendance aux importations et de préserver les ressources naturelles. À Dunkerque, des initiatives voient le jour pour organiser le retour de ces matériaux dans la chaîne de production.

Vers une intégration technologique accrue

L’innovation s’étend bien au-delà de la chimie des cellules. L’arrivée de systèmes de gestion intelligents, les fameux BMS (battery management systems), optimise la sécurité, la longévité et l’efficacité énergétique des batteries. La filière se repense dans son ensemble, de la conception à la seconde vie. Alliances entre constructeurs automobiles, industriels de la chimie et spécialistes du stockage : la dynamique collective s’accélère.

La vallée de la batterie, portée par l’émulation des Hauts-de-France, trace déjà la voie d’une industrie française capable de relever les défis de l’électromobilité européenne.

Le compte à rebours est lancé. À chaque nouvelle usine, c’est un pan de souveraineté qui se reconstruit, entre ambitions industrielles, défis écologiques et soif d’innovation. Reste à voir si la France saura transformer cette effervescence en véritable puissance sur la carte mondiale des batteries.

D'autres articles sur le site